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Édition : BoD – Books on Demand GmbH, 12/14 rond-point des Champs-Élysées, 75008 Paris.

Impression : BoD - Books on Demand GmbH, Norderstedt, Allemagne.

ISBN : 9782322249466

Dépôt légal : mars 2021

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I. — CE QUE L’ÉCRITURE NOUS APPREND
DES ESPRITS

L’existence des anges était un dogme reçu presque généralement chez tous les Juifs. Les seuls Saducéens contredisaient cette doctrine, en niant qu’il y eût des Esprits 1 ; ce qui doit paraître très singulier, puisque les Livres sacrés de l’Ancien Testament, et même le Pentateuque, supposent en une infinité d’endroits qu’il y a des anges. La première espèce dont il soit parlé dans l’Écriture est celle des chérubins. Dieu en avait placé un à l’entrée du Paradis terrestre 2 pour garder l’arbre de vie après la désobéissance du premier père. Le Prophète Ezéchiel suppose 3 qu’ils avaient des ailes.

Les Commentateurs qui ont fait la description de la figure des Chérubins 4 ont moins consulté l’Écriture que leur propre imagination : aussi en ont-ils fait des monstres. Ils ont cru qu’ils tenaient de l’homme, de l’aigle, du bœuf et du lion. Ils avaient, disent-ils, le visage de l’homme, le dos couvert d’un grand poil comme celui de la crinière d’un lion, les cuisses et les pieds de veau, et le corps couvert de quatre grandes ailes : d’autres les ont dépeints comme un homme, dans la tête duquel on voyait la face de l’homme, du bœuf et du lion de trois côtés, et un aigle placé sur un casque qui couvrait cette tête à trois faces. Entre et derrière les épaules, on voyait quatre grandes ailes, deux de chaque côté. Cette figure avait quelque rapport au Sphinx ; ce qui a fait croire à saint Clément d’Alexandrie que le Sphinx des Égyptiens était une imitation du Chérubin des Hébreux. Le Prophète Isaïe parle de ces esprits 5 ; il assure que Dieu est assis sur les Chérubins : il fait aussi mention des Séraphins, et c’est le seul des écrivains sacrés qui en dise quelque chose ; il les dépeint 6 comme ayant six ailes. Nous voyons dans les Psaumes, qu’il y a un ordre de substances spirituelles appelées Vertus 7, qui servent de ministres à l’être éternel.

Le nom le plus communément donné à ce genre de créatures est celui d’Anges, qui dans son origine signifie député ou messager. L’auteur de la Genèse, qui suppose l’existence de ces esprits, n’a pas jugé à propos de parler du temps de leur création ; ce qui a été l’occasion de plusieurs conjectures frivoles pour les Commentateurs, qui se croient dans l’obligation de deviner ce que l’Auteur qu’ils interprètent a laissé dans l’obscurité. Les Pères grecs et latins qui ont précédé saint Augustin ont enseigné 8 que les anges furent créés avant le monde ; et ils se fondent sur le passage de Job 9 qui dit que les fils de Dieu louaient l’Éternel avec les astres du matin, lorsqu’il posait les fondements de la terre. Saint Augustin suivi en cela du plus grand nombre des Interprètes, a cru que les anges avaient été créés le premier jour avec la lumière. Origène a prétendu que, sous le nom d’eaux supérieures que l’Écriture place au-dessus du Firmament et que le Prophète invite à louer le seigneur, il ne fallait point entendre des eaux réelles, mais les esprits bienheureux, et que les eaux inférieures, qui sont placées dans les abîmes, n’étaient autre chose que les Démons, mais ces allégories ont trouvé peu de partisans. Ce qui est constant par l’Écriture, c’est qu’il y a un grand nombre d’esprits méchants, dont la principale fonction est de persécuter les hommes et de les induire en tentation 10. Ils n’étaient pas méchants dans l’origine, mais ayant voulu se rendre indépendants de l’Être suprême, ils sont restés dans cet état habituel de méchanceté. Le temps qui a précédé leur apostasie n’est point exprimé dans l’Écriture, saint Augustin a cru qu’ils avaient péché le jour même de leur création. La preuve qu’il en donne n’est pas démonstrative. Il se fonde sur ces paroles de la Genèse : il sépara la lumière des ténèbres, c’est-à-dire, que selon ce Père, Dieu sépara les bons Anges d’avec les mauvais. On ne trouve le nom ni d’aucun Ange, ni d’aucun diable dans les Livres écrits avant la captivité, car le terme de Satan qui répond à celui d’adversaire, caractérise plutôt les fonctions du chef des mauvais esprits, qu’il ne le désigne par son vrai nom ; c’est ce qui a fait dire aux Juifs dans le Talmud de Jérusalem, que c’était à Babylone que leurs pères avaient appris les noms des anges 11.

Les Livres sacrés écrits depuis la destruction de la Monarchie des Juifs nous apprennent les noms de quelques Anges. Daniel 12 parle de Michel et de Gabriel. Il suppose que Gabriel avait des ailes. Raphaël est le héros du Livre de Tobie 13 : il triomphe d’Asmodée ; il le saisit et l’enchaîne dans les déserts de la haute Égypte. C’est lui qui présente à Dieu les prières de Tobie ; et il est un des sept esprits qui sont toujours devant le Seigneur 14.

Il est fait mention d’Uriel et de Jérémiel dans le quatrième Livre d’Esdras ; mais ce Livre n’est pas canonique.

Le premier nom propre de diable que nous lisions dans l’Écriture, est celui d’Asmodée, dont il est parlé dans le Livre de Tobie 15 ; et en expliquant assez naturellement ce qui est dans cet Ouvrage, on pourrait penser que le diable est susceptible d’amour et de jalousie : il semble que ce sont ces passions qui déterminèrent Asmodée à tuer les sept premiers maris de Sara. Il est parlé dans ce même Livre 16 d’une recette, pour mettre en fuite tous les démons. Elle consistait à mettre sur des charbons une partie du cœur d’un gros poisson, qui malheureusement n’est pas nommé. La fumée éloignait les mauvais esprits. La musique produisait aussi ces mêmes effets ; et le Roi Saül y avait recours, pour être soulagé, lorsqu’il était tourmenté par le mauvais esprit 1718